"S’aider les uns les autres avant de compter sur l’hypothétique appui du Ciel. C’EST DE CELA , chante la tradition communiste, QUE VIENDRA LE SALUT COMMUN"

Publié le par R.B

 

Le rêve de la fraternité

 

« Noël ! Noël ! »

Durant des centaines d’années,

le cri de liesse des foules d’Occident saluait

la venue du Sauveur.

Depuis 2005 ans, l’humanité est bien placée pour savoir qu’il n’est pas de sauveur suprême

et qu’il importe de s’aider les uns les autres avant de compter sur l’hypothétique appui du Ciel.

C’est de cela,  chante la tradition communiste, que viendra le salut commun.

C’est dire l’utilité des initiatives qui mobilisent ce week-end des milliers de bénévoles

en faveur des associations de solidarité, les unes s’efforçant de panser les plaies sociales

dans une période qui devrait être toute de réjouissances,

les autres apportant de la chaleur à ceux que la maladie isole,

des enfants souvent, éloignés des sapins et des guirlandes.

Cette solidarité prend d’autant plus de force que la République rate aujourd’hui son rendez-vous,

sa promesse de naissance avec la fraternité.

La légion silencieuse et meurtrie des sans-abri

- chômeurs ou travailleurs pauvres

trop précaires et trop mal payés pour obtenir un logement -

atteste du dysfonctionnement social,

de cette machine à broyer qui tourne à plein,

couplée à celle qui produit

de faramineux profits pour les multinationales.

Engagées dans une surenchère réactionnaire, les factions de la droite menacent tous les garde-fous, toutes les digues

qui protègent du retour des grandes pauvretés.

Ici, le MEDEF réduit l’indemnisation des chômeurs,

là le gouvernement multiplie les dispositifs pour priver d’aides les sans-emploi. 

Chez Bosch, la direction veut revenir 25 ans en arrière et à 40 heures hebdomadaires de travail,

avant sans doute de corser l’addition pour les salariés. Le contrat nouvelles embauches

de Dominique de Villepin fait de la précarité une règle

et généralise l’insécurité sociale.

Son rival, Nicolas Sarkozy, réclame la fin des zones d’éducation prioritaire

qui permettent de réduire l’échec scolaire

dans les banlieues défavorisées,

et aussitôt le ministre de l’Éducation s’exécute et taille dans le vif.

Le discours du mépris à l’égard des milieux modestes

et des jeunes remplace le respect dû aux citoyens,

et on assiste au retour d’un vocabulaire daté du XIXe siècle

et des fureurs de la bourgeoisie au beau temps du Front populaire.

La droite au pouvoir fait litière de la décolonisation gaulliste pour exalter « la mission civilisatrice »

qui écrasa sous sa botte les peuples d’Afrique et d’Asie, les traitant comme des hommes de deuxième catégorie.

Elle prend

les mêmes accents que l’extrême droite, flatte des peurs identiques,

use du même populisme.

La tentation autoritaire

- la France est toujours sous un régime d’exception, l’état d’urgence -

s’affirme.

Et la politique américaine si chère à l’élu de Neuilly est présentée comme un modèle à opposer au « modèle social français », dont

les acquis, les règles et les dispositifs de solidarité sont jugés archaïques dans la jungle mondialisée qu’espère l’UMP.

Si les ressorts de la fraternité - le rêve républicain - n’ont pas disparu dans la population,

les associations caritatives elles-mêmes lancent des cris d’alarme devant

la marée haute des souffrances et les déchirures du tissu social qu’elles ne parviennent plus à ravauder.

La dérive ultra-réactionnaire de la droite n’est plus seulement une posture,

elle passe aux actes.

Et disons-le franchement,

la gauche n’est pas à la hauteur des ripostes nécessaires.

Elle peut pourtant s’appuyer sur la profondeur du courant antilibéral dont a témoigné le référendum du 29 mai.

Il devient urgent qu’elle se rassemble - dans toutes ses composantes -

pour édifier, en dialogue permanent avec notre peuple, un projet alternatif,

une politique qui prenne franchement le contre-pied du libéralisme

et qui s’assure contre les déceptions.

Si ce cadeau-là n’est pas au pied du sapin, on attendra bien l’année 2006 pour l’empoigner...

> Par Patrick Apel-Muller <

http://www.humanite.presse.fr/journal/2005-12-24/2005-12-24-820572

Publié dans THÉORIE - PRAXIS

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article